Les lectures de ce dernier dimanche de l'avent, sont christocentriques.
Le Christ est annoncé comme le bon Berger (première lecture), le sacrifice unique (seconde lecture) et comble d'Esprit Saint à Élisabeth (Évangile). Noël est fête de joie et d'allégresse du monde, car le Verbe de Dieu vient habiter parmi nous. "C'est lui qui nous donne la joie d'entrer déjà dans le mystère de Noël, pour qu'il nous trouve, quand il viendra, vigilants dans la prière et remplis d'allégresse"(Préface). Il vient pour faire la volonté du Père. La sainte nuit de Noël et la nuit où Jésus fut livré sont inséparables, car c'est toute la vie de Jésus du début jusqu'à la fin qui est un sacrifice agréable à Dieu, pour notre salut. C'est grâce à cette volonté que nous sommes sanctifiés.
1. L'HUMILITÉ DE DIEU FAIT HOMME
La condescendance de Dieu au coeur de la création est un signe de son humilité. Dieu a choisi la voie de l'humilité par son incarnation pour ne rien perdre de ce qu'il a créé par et pour amour.
Le prophète Michée annonce la venue imminente de Dieu qui vient libérer son peuple en ces paroles qui nous remplissent d'espérance et de joie: "Toi, Bethléem Éphrata, le plus petit des clans de Juda, c'est de toi que sortira pour moi celui qui doit gouverner Israël". L'incarnation manifeste l'humilité de Dieu qui accepte l'humiliation de la croix, "pour nous les hommes et pour notre salut".
Le prophète Michée décrit d'une façon admirable les origines lointaines du Sauveur d'Israël: il sera le berger des fils d'Israël, il sera grand jusqu'aux lointains de la terre, il sera la paix. Le Rédempteur né d'une femme, aura la mission de rassembler ce peuple dispersé dans l'unité.
Dans cette mission salvifique, une femme y sera impliquée. La Vierge Marie, jardin bien clos, sera cette terre que germera le Sauveur selon les paroles du prophète Isaïe (45,8).
Celui qui doit gouverner Israël ne viendra pas de Jérusalem, mais de Béthléem, car selon saint Paul, "ce qu'il y a de faible dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre les puissants (1Co1,27). Il y a un rapport étroit entre le lieu de la naissance du Fils de Dieu et sa mission. Le Maître de l'Eucharistie, naîtra à Béthléem (Bet-lehem) qui signifie "la maison du pain". Jésus, pour réaliser la prophétie de Michée sera lui-même le pain rompu pour rassembler la multitude dans l'unité. Le nouveau Béthléem est son Église, le peuple de la nouvelle alliance uni par le sacrement admirable de la fraction du pain.
2. LE SACRIFICE DU CHRIST.
La lettre aux Hébreux dit: "Tu n'as pas voulu des holocaustes et moi j'ai dit: me voici Seigneur pour faire ta volonté". Dans le livre des Lévitiques, on distinguait plusieures formes de sacrifices à savoir: holocauste, oblation, sacrifice de réparation et de communion (Lv1,7).
Sur la croix, Jésus est le sacrifice unique, l'Agneau immolé, qui porte sur lui le péché du monde. La croix devient l'essence de l'être-chrétien, le "cas sérieux" selon Hans Urs Von Balthasar.
Le vrai médiateur entre Dieu et l'homme est l'homme-Dieu, Jésus notre Sauveur (cfr1Tm2,5), lui qui a résisté jusqu'au sang dans la lutte contre le péché (He12,4). Il est prêtre éternel, offrande et offrant. Saint Augustin écrit: "Devant ce sacrifice vrai et suprême, tous les autres faux sacrifices deviennent inutiles"(cf. La cité de Dieu, X,20). Saint Thomas dans son hymne "Lauda Sion" dit qu'avec le sacrifice du Christ, "la lumière chasse les ténèbres ".
Dieu n'a donc pas besoin de nos sacrifices extérieurs, il veut "un coeur brisé et broyé"(Ps50).
Ainsi, nos liturgies sont vaines si elles ne sont pas le fruit d'un élan du coeur, d'un amour sans partage avec le Seigneur et ne favorisent pas la communion avec nos frères et soeurs. Le sacrifice du coeur est "une charge d'amour qui permet à l'individu de tout abandonner et de s'abandonner soi-même entre les mains de Dieu. Cette charge d'amour constitue le vrai fondement de tout sacrifice. Dieu n'a donc pas besoin de victimes sacrificielles qui demeurent un moyen et non une fin pour entrer en communication avec Lui, mais il désire le don du coeur"
(Elie Ndabadugitse, Le sacrifice d'Abraham, p.608).
3. LE SACRIFICE DU COEUR DE MARIE.
Le sacrifice du coeur est l'abandon de soi dans les mains de Dieu qui est la seule part d'héritage pour l'homme (Ps16,5). Quel était l'état d'âme de Marie, quand l'Ange la quitta?
Pourquoi va-t-elle en hâte chez sa cousine Élisabeth?
Luc sans répondre à ces questions, écrit simplement que Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée. Marie est une jeune fille de silence, qui conserve tout dans son coeur (Lc2,51). Elle sait que sa cousine dans sa vieillesse est aussi enceinte, selon l'information de l'ange. "Rien n'est impossible à Dieu". Si on y réflechit en profondeur, la Vierge Marie traversait une sorte de nuit de la foi, une forme de crise, voire une dépression liée à son oui qui engage toute son existence qui ne permet plus le retour en arrière.
La vérité de l'annonciation est très profonde, lourde de conséquence, saturée de sens difficile à communiquer. Joseph son fiancé, sera informé par l'ange quand il pensait l'abandonner en secret.
Une des raisons majeures de cette visite en hâte pourrait être le besoin de la Vierge Marie d'ouvrir son coeur à sa cousine, en espérant d'être écoutée, comprise sans être jugée. Dieu avait déjà préparé l'accueil, pour ne pas maintenir son humble servante dans cette condition ténébreuse.
À peine Elisabeth entend la salutation de Marie, l'enfant tressaillit en elle. Remplie d'Esprit Saint, la future mère du précurseur est saisie d'émotion, entre en extase en criant d'une forte voix: "Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni".
Ces paroles libèrent la mère de Dieu et ne peut que chanter le Magnificat. La visitation devient libératrice. Marie ne craint plus rien, car "si Dieu est pour nous, qui sera contre nous"! Elle est libre de passer trois mois chez sa cousine Élisabeth en l'aidant à faire certains travaux domestiques, puisque Zacharie est muet à cause de son incrédulité. La vie de Marie est un sacrifice continu de son coeur immaculé jusqu'au dernier souffle de son Fils. C'est sur la croix que la pleine de grâce nous est donnée par son Fils en disant à son disciple bien aimé: "Voici ta mère" et à sa mère: "Voici ton fils".
4. PRIÈRE POUR LA FIDÉLITÉ À NOTRE VOCATION
Seigneur, tu nous appelles à coopérer à ton dessein d'amour.
Donne-nous un coeur fidèle jusqu'au bout à notre oui, comme celui de la Vierge Marie ta mère.
Toi qui n'a pas besoin ni d'holocauste, ni de sacrifice, fais que notre vie soit: "Me voici, je suis venu pour faire ta volonté".
Accorde-nous la joie de t'appartenir et que cette joie soit contagieuse dans ce monde crépusculaire marqué par tant de tristesse, de peur liée à l'incertitude du lendemain, de guerre devenue planétaire, de déception face aux espoirs illusoirs d'un monde sans Dieu.
Toi le bon Berger, réveille ta vaillance et viens nous sauver. Que ta main soutienne ton protégé, le fils de l'homme qui te doit sa force. Jamais plus nous n'irons loin de toi: fais-nous vivre et invoquer ton nom, Amen.
Bon dimanche frères et soeurs.
Paix et joie dans nos coeurs et dans le monde.
Ton frère Abbé Ferdinand Nindorera